Pour le Gardois Alexandre Pascal, membre de l'Inspection générale des affaires sociales : « les écrans doivent retrouver leur juste place, au service de l’humain »

  • Énarque, haut fonctionnaire, Alexandre Pascal est membre de l’Inspection générale des affaires sociales.
    Énarque, haut fonctionnaire, Alexandre Pascal est membre de l’Inspection générale des affaires sociales. D.R. - Midi Libre
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Le 30 avril, à l’Élysée, le rapport "Enfants et écrans. A la recherche du temps perdu" était officiellement remis au Président de la République. Le Gardois, originaire de Clarensac, Alexandre Pascal en a été le co-rapporteur.

Mardi 30 avril, le rapport "Enfants et écrans. A la recherche du temps perdu" était restitué au Président de la République. Comment et pourquoi vous êtes vous retrouvé corapporteur de ce projet ?

À l’heure de nos sociétés du “tout connecté”, beaucoup d’informations souvent contradictoires sur les écrans circulent. Qu’ils s’agissent de leurs possibles bienfaits, de leur dangerosité réelle ou supposée, le consensus scientifique est rare. Parce qu’il lui est apparu nécessaire de faire le point, tout particulièrement sur le rapport entre ces écrans et nos enfants, le chef de l’État a installé courant janvier une commission composée de 10 experts, pour la réalisation d’un point de situation complet et détaillé. En ma qualité d’Inspecteur général membre de l’IGAS (Inspection générale des affaires sociales), j’ai été nommé corapporteur au sein de ce groupe de travail aux côtés de Carole Bousquet-Bérard, actuelle directrice de cabinet de la ministre de la santé et de la prévention.

Durant trois mois, nous étions chargés de l’organisation pratique des travaux de la commission, tout en proposant notre expertise ainsi qu’un appui technique à ses dix membres. Des sommités dans leur domaine respectif : juridique, psychiatrie, neurologie, éducation et protection de l’enfance.

Votre rapport dresse un constat préalable particulièrement alarmant, s’agissant de la place désormais affectée aux enfants dans notre société.
Qu’en est-il précisément ?

Au fil de nos travaux préparatoires, nous avons en effet constaté que la présence quasi-permanente des écrans dans nos vies et leur multiplicité (téléphone, tablette, ordinateur...) a pour effet d’invisibiliser les plus jeunes.

Qui n’a pas observé, dans un train par exemple, un parent dépassé mettre un écran entre les mains d’un tout-petit, pour que celui-ci arrête de bouger, de parler, ou bien plus simplement d’interagir avec ceux qui l’entourent ? Avec les écrans, nos enfants disparaissent, s’effacent au sein du groupe social. Et il nous semble urgent de leur rendre leur juste place !

Quels sont les risques majeurs de l’exposition des enfants aux écrans relevés par votre commission ?

Ils sont de plusieurs ordres. Tout d’abord somatique, en ce que les écrans altèrent le temps et la qualité du sommeil et favorisent la sédentarité ainsi que la mauvaise alimentation des utilisateurs. Des utilisateurs qui se retrouvent, dès lors, plus exposés aux pathologies cardiaque, à l’obésité et au diabète. Notons aussi que les cas de myopie explosent. On peut véritablement parler en la matière d’épidémie. Et pas seulement en Asie !

Chez les plus petits, l’apprentissage du langage ou encore des émotions, et plus généralement leur développement global, sont sérieusement altérés par ce que l’on nomme la « technoférence ». A savoir l’interruption de la communication interpersonnelle en raison de cette attention portée aux dispositifs technologiques personnels.

S’agissant enfin des risques pour la santé mentale, les écrans sont, selon nous, des facteurs aggravants de certaines pathologies chez les sujets ayant des prédispositions et fragilités. Mais ils ne peuvent, à notre sens, être considérés comme le facteur déterminant dans la survenance de ces pathologies.

Quid des solutions ?

Désormais dans les mains du gouvernement, notre rapport suggère sur près de 50 pages pas moins de 29 recommandations interdépendantes pour remettre au plus tôt les écrans à leur juste place : à savoir au service des êtres humains. Réguler la place des écrans dans la vie des enfants et des adolescents est devenu un enjeu de santé publique, alors qu’en France, en 2023, les jeunes de 13 à 18 ans disposaient de pas moins de 3 écrans propres, et les 7-12 ans, d’1,6 écran (tablette, smartphone, ordinateur portable) !

En pratique, ces propositions – à concrétiser à l’échelle européenne – visent à responsabiliser les acteurs de l’économie numérique, les établissements d’éducation et de la petite enfance ainsi que les familles au bon usage des écrans. Et, enfin, à proposer un accompagnement encadré et progressif des enfants vers le numérique. Pour un usage sans danger et surtout adapté à chaque âge.

https://www.elysee.fr/admin/upload/default/0001/16/fbec6abe9d9cc1bff3043d87b9f7951e62779b09.pdf
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