"La seule ville qui doublait les concerts" : comment René Koering a porté la musique classique au plus haut niveau à Montpellier

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  • Pendant ses seize années aux commandes du Festival de Radio France Montpellier, René Koering a attiré les plus grands noms du classique, du jazz et des musiques du monde.
    Pendant ses seize années aux commandes du Festival de Radio France Montpellier, René Koering a attiré les plus grands noms du classique, du jazz et des musiques du monde. Midi Libre - JEAN-MICHEL MART
Publié le , mis à jour

NOTRE SERIE "Ils ont fait rayonner Montpellier" 4/8. En 1984, René Koering proposait à Georges Frêche l’idée d’un grand festival de musique à Montpellier. Porté par sa passion et soutenu dans ses ambitions, il fera venir jusqu’en 2011 les plus grands chefs d’orchestre et interprètes mondiaux, prenant aussi les rênes de l’Orchestre et de l’Opéra. Une aventure qu’il raconte dans une symphonie de souvenirs.

Avec le Festival de Radio France et Montpellier, il a placé la ville aux premiers rangs des grands rendez-vous musicaux en France, lui donnant une notoriété mondiale. Du milieu des années 80 jusqu'en 2011, René Koering fait venir dans la capitale héraultaise les plus grands interprètes et chefs d’orchestres, révèle de nouveaux talents, met à l’affiche des œuvres rares, ouvre la programmation au jazz, aux musiques du monde, à l’électro. Il dirige aussi l’Orchestre Opéra National de Montpellier jusqu’en 2011, crée le Chœur symphonique de Montpellier en 2006. Un pan entier de la vie culturelle locale.

1985, première édition du festival. René Koering accueille le violoncelliste Mstislav Rostropovitch.
1985, première édition du festival. René Koering accueille le violoncelliste Mstislav Rostropovitch.

Il voit grand, Georges Frêche aussi

Quand il raconte les débuts de cette aventure, René Koering cite immédiatement Georges Frêche, co-fondateur du festival avec le PDG de Radio France, Jean-Noël Jeanneney. Le maire voit grand, et cela plaît à celui qui dirige alors France Musique. "Je lui dis, cent concerts dans le mois, ça vous va ? Il était très enthousiaste. Un an après, on commençait." La ligne artistique ? "Georges Frêche ne m’a rien dit à ce propos. Mais il voulait "Violettes impériales" (une opérette de Vincent Scotto, NDLR). J’ai dit non ! Il adorait ça (rires). Dans sa voiture, il avait une cassette de Luis Mariano". Ce qui n’empêche pas Georges Frêche de venir ensuite à tous les concerts du festival.

René Koering en compagnie du pianiste Evgeny Kissin et du chef d’orchestre Emmanuel Krivine, tous deux fidèles du festival pendant de nombreuses années.
René Koering en compagnie du pianiste Evgeny Kissin et du chef d’orchestre Emmanuel Krivine, tous deux fidèles du festival pendant de nombreuses années.

Rostropovitch revoit son cachet à la baisse

Lors d’une répétition avec l’Orchestre de Montpellier, dans la salle Berlioz, au Corum.
Lors d’une répétition avec l’Orchestre de Montpellier, dans la salle Berlioz, au Corum. Midi Libre - JEAN-MICHEL MART

Dès la première édition en 1985, l’événement frappe fort, avec le violoncelliste Mstislav Rostropovitch et le bandéoniste Astor Piazzola. "Je n’avais pas l’argent, j’ai profité de la caution de France Musique. J’ai dit à Rostropovitch que je ne pouvais pas lui donner ce qu’il demandait. Il a finalement accepté de venir pour l’équivalent de 5 000 € au lieu de 25 000. Par la suite, les autres artistes ont suivi." Quelques aléas, lors des premiers concerts dans la cour Jacques-Cœur (actuelle extension du Musée Fabre) : "L’alarme du musée s’était déclenchée, des riverains regardaient un match de foot fenêtres ouvertes. C’était un peu rock’n’roll au départ !" Mais le public est au rendez-vous. "Dès le début, ça a fonctionné. Nous étions la seule ville qui doublait les concerts, deux fois 2 000 spectateurs, au moins 3 000." Même si les étrangers ont parfois du mal à situer Montpellier sur la carte. "Les Américains me disaient, c’est où Montpellier ? Certains croyaient que c’était vers Monaco."

Le 14 juillet 2008, un concert exceptionnel réunissant 22 Stradivarius entre les mains des musiciens.
Le 14 juillet 2008, un concert exceptionnel réunissant 22 Stradivarius entre les mains des musiciens.

Nicollin impressionné par "le Maradona du piano"

Mais à ceux qui prédisaient qu’il n’y aurait pas de deuxième édition, René Koering installe le rendez-vous dans la durée, et au plus haut niveau. La Ville lui en donne les moyens. "J’ai dit à Georges Frêche : il me faut une salle de concert d’au moins 2 000 places, une fosse d’orchestre, une salle de répétition. Le Corum était inauguré en 1990." Les plus grands noms se succèdent : les chefs Claudio Abbado, Lorin Mazel, Yehudi Menuhin, la soprano Montserrat Caballé, le pianiste Nikolaï Lugansky, le sitariste Ravi Shankar… René Koering se souvient d’un concert du pianiste autrichien Alfred Brendel. "J’avais invité Louis Nicollin, qui était mon mécène. Assis à côté de moi au premier rang, il se penche et me dit : "Est-ce que ça serait pas le Maradona du piano ? Il avait su le voir tout de suite !"

1996 : près de 14 000 personnes assistent, sur la plage du Grau-du-Roi, à la retransmission sur grand écran de la 9e Symphonie de Beethoven dirigée par Yehudi Menuhin.
1996 : près de 14 000 personnes assistent, sur la plage du Grau-du-Roi, à la retransmission sur grand écran de la 9e Symphonie de Beethoven dirigée par Yehudi Menuhin.

Découvreur de jeunes talents

Le festival met à l’affiche des partitions peu jouées, notamment sous la baguette du chef Friedemann Layer, directeur musical de l’Orchestre de Montpellier. Parmi ces œuvres rares, René Koering se souvient avoir proposé un rôle de l’opéra Henri VIII, de Saint-Saëns, au jeune Roberto Alagna, en 1987. "Il a finalement annulé, mais est revenu très souvent par la suite." Le directeur repère et invite d’autres jeunes artistes prometteurs : les pianistes Evgeny Kissin et Fazil Say, ou la mezzo-soprano Marianne Crebassa, originaire d’Agde. "Le premier rôle que je lui ai fait tenir était dans l’opéra de Bernard Hermann, Les Hauts de Hurlevent".

L’exceptionnel concert aux 22 Stradivarius

Il imagine des concerts-événements, comme celui qui réunit, en 2008, 22 Stradivarius, violons, altos et violoncelles, prêtés par des particuliers et des musées du monde entier, aux musiciens de l’Orchestre National de Montpellier. "C’est une idée que j’ai eue avec un ami luthier de Montpellier. Ça a pris un an à organiser. Le jour du concert, les instruments étaient réunis au Musée Fabre, cela représentait 73 millions d’euros. On les a amenés un par un jusqu’au Corum, chacun avait deux gardes du corps !"

Autant de projets menés, en parallèle à ses fonctions à Radio France. "Ça faisait quand même beaucoup, reconnaît-il. On m’a reproché de gagner beaucoup d’argent. Ça n’a pas plu à certaines personnes, je le comprends." Il quitte ses fonctions après la mort de Georges Frêche. "Le lendemain, on m’a signifié que j’étais viré". "Pour des raisons politiques", dit-il à l’époque. "Il a été difficile de trouver quelqu’un qui voulait faire la même chose que moi. Ensuite, ce n’était pas le même niveau", observe aujourd’hui René Koering. L’été prochain, pour la première fois, il reviendra au festival, où sont programmés Evgeny Kissin et Marianne Crebassa, qu’il avait programmés à leurs débuts. "Kissin m’a dit, si tu ne viens pas, je ne joue pas !"

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Les commentaires (1)
Pablo34 Il y a 14 jours Le 02/05/2024 à 21:58

Amusant il est parti avec 800 kEUR dans ses poches peucherette.