Ambulance en "covoiturage", jusqu’à 30 kilomètres de détour… pourquoi les futures règles de transport sanitaire inquiètent

  • L’objectif est de permettre à la Sécu de faire des économies.
    L’objectif est de permettre à la Sécu de faire des économies. MAXPPP - Luc Nobout
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Midi Libre

Le projet de décret, dévoilé vendredi par franceinfo, inquiète notamment les associations de malades.

La précision, couchée noir sur blanc dans le projet de décret consulté par franceinfo, fait déjà débat. Les patients pourront désormais être obligés de faire jusqu’à 30 kilomètres de détour lors de leur prise en charge médicale en raison du futur principe de partage des transports sanitaires.

On le savait déjà : plusieurs patients devront prendre une même ambulance ou un taxi sanitaire à destination ou au départ d’un hôpital. Une mesure contestée, notamment, par les ambulanciers et les taxis.

Mais elle a été validée cet automne par le Parlement pour permettre à la Sécurité sociale de faire des économies.

Ce que contient le décret

Le remboursement des transports sanitaires a coûté, en effet, 5,7 milliards d’euros en 2022, en forte augmentation.

Mais le décret autorise aussi un détour de 10 kilomètres par passager dans la limite de 30 kilomètres.

Perspective qui fait bondir Bruno Lamothe, de l’association de malades du rein Renaloo. Rallonger le trajet retour d’un patient après une dialyse ou une chimiothérapie peut poser problème, selon lui. "Le malade peut avoir des nausées, des vomissements… Et cette personne va se voir imposer un détour jusqu’à 30 km alors qu’elle est en situation de vulnérabilité", explique-t-il au micro de franceinfo.

"Une personne qui habite au Grau-du-Roi, dans le Gard, à 30 km de Montpellier, va mettre 44 minutes en hiver, mais 3 h 45 en plein été, à cause de bouchons pour aller sur les plages…", souligne Bruno Lamothe.

"Risques sanitaires"

"Si on raisonne plutôt en temps qu’en kilomètres, on va amoindrir les disparités locales, qui peuvent être celles des grandes villes en heure de pointe", abonde Alain Olympie, représentant des usagers de l’AP-HP à l’hôpital Saint-Antoine, à Paris, cité par le même média.

"Maintenant, la règle va être le transport collectif et non pas le transport individuel", et cela conduira "nécessairement" à une dégradation du service pour les malades, déplore-t-il.

Le tout, assorti de "risques sanitaires", selon lui, le décret ne prévoyant pas le port obligatoire du masque dans le véhicule. Catherine Simonin, de la Ligue contre le cancer et France Assos santé, soulève un autre écueil : le décret indique que le temps d’attente pour le délai de l’ambulance ou du taxi doit être "raisonnable", sans autre précision.

"Des dispositions très vagues, très floues…"

Or "on voit bien qu’aux urgences, on peut attendre cinq heures parfois. Ce sont des dispositions très vagues, très floues…", observe-t-elle.

Pour éviter ces désagréments, les patients pourront encore bénéficier d’une ambulance individuelle en produisant l’ordonnance d’un médecin spécifiant que leur état est incompatible avec un transport partagé.

Comment éviter le transport collectif

Si ce n’est pas le cas, ils pourront toujours refuser ce trajet collectif. Mais ils devront, pour cela, avancer eux-mêmes les frais de déplacement, soit tout de même 13 000 € de frais en moyenne par an et jusqu’à 20 000 € pour une personne dialysée.

À partir de l’année prochaine, les réfractaires devront cette fois s’acquitter d’une pénalité, dont le montant n’a pas encore été dévoilé.