Pauvreté des enfants : Béziers la ville la plus touchée d’Occitanie

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  • Les Restos du Coeur à Béziers consacrent des créneaux horaires particuliers aux familles avec bébés.
    Les Restos du Coeur à Béziers consacrent des créneaux horaires particuliers aux familles avec bébés. - F.Faux
Publié le , mis à jour

Un jeune sur quatre est confronté à la pauvreté en Occitanie, mais à Béziers, c'est plus d'un enfant sur deux.

Béziers, Restaurants du cœur. C’est l’heure où se déroule la distribution de produits bébés. "Du lait maternel, des couches, des vêtements, énumère Denis Colle, le responsable. On voit de plus en plus de familles monoparentales, souvent des femmes seules, avec enfants. Après le divorce, ou la séparation, elles ont sombré dans la pauvreté." Un constat qui rejoint celui de l’Insee Occitanie. Dans une étude publiée en février, l’Institut révélait qu’en 2020 un enfant de moins de 11 ans sur quatre vivait dans un ménage pauvre. Dans les villes, ce taux est encore plus élevé : 37 % à Montpellier, 45 % à Nîmes, 50 % à Perpignan. Mais c’est Béziers qui détient le record, avec 52 %.

Comment vivent ces jeunes Biterrois ? Quel est le quotidien de ces familles ? Les éducatrices du SOAE (service créé en 1964 et géré par l’association Adages), chargées de la protection de l’enfance, font partie des rares qui peuvent répondre à ces questions. Elles participent en effet à la mise en place de tout un panel de mesures, du placement aux visites à domicile, et suivent plus de 1 000 enfants dans l'Ouest héraultais. Elles interviennent en cas de maltraitance, de non-respect de l’obligation scolaire, dans tous les milieux, en veillant à ne jamais stigmatiser les familles pauvres. "Il est important de ne pas réduire ces parents à leurs difficultés", explique la directrice Claire Garnier. "Si un enfant n’a pas sa chambre et dort sur un matelas au sol, c’est triste, mais ça ne le met pas en danger, ajoute l’éducatrice Yannick Viguerie. Les parents peuvent être très pauvres, et aussi très aimants. Ils font du mieux qu’ils peuvent."

Comportements aberrants

Il n’en reste pas moins que la pauvreté – qui induit des logements insalubres, une alimentation déséquilibrée, un déficit d’information sur la manière de stimuler les enfants – peut empêcher les parents d’assumer leur rôle, en anesthésiant la volonté, voire en amenant à des comportements aberrants. "Pour faire plaisir aux enfants, on boit du soda au lieu de l’eau, le chauffage est à fond et les fenêtres ouvertes, on achète de la malbouffe parce que c’est moins cher et on voit de plus en plus d’enfants atteints d’obésité morbide, constate Yannick Viguerie. À un moment on lâche tout, et on entraîne les enfants avec."

Pour les éducatrices en visite dans les familles pauvres, il y a des signes qui ne trompent pas. On pense aux enfants privés de cadeaux de Noël, ou de vacances, mais il y a plus grave : "Des gamins qui vont à l’école sans se laver pour économiser l’eau, sans petit-déjeuner, ou avec des habits qui ne sont pas à leur taille", "des dents abîmées parce qu’on ne va pas chez le dentiste". "L’année dernière, j’ai suivi une femme avec quatre enfants qui vivait dans un mobile home et faisait des ménages dans un camping du Cap, raconte Elisabeth Chevallier. Quand j’ai demandé à l’aîné s’il avait besoin de quelque chose, il m’a répondu : une couverture. Parce qu’il avait froid la nuit…"

"Sortez-moi de là !"

Ces problèmes matériels, ajoutés au comportement de certains parents qui n'ont pas conscience de la charge et de la responsabilité qu'implique l'éducation d'un enfant  – les Restos du cœur font le même constat – amènent à des situations douloureuses pour les professionnelles du SOAE : "On a toutes vécu ces moments où l’enfant que l’on va visiter dans sa famille se fait tout de suite très proche, monte sur vos genoux, demande de l’attention, et vous tend la main quand vous partez avec un regard qui dit : Sortez-moi de là !" Mais les familles pauvres, c’est un fait, ont souvent d’autres chats à fouetter : "On peut constater qu’un enfant est délaissé et reste sur les écrans toute la soirée, déplore Marie-Claude Azzoune, une autre éducatrice, mais quand les parents ne peuvent pas payer leur facture d’électricité, ou d’eau, c’est difficile de leur reprocher ça."

Comment s’en sortir ?

L’une des principales menaces qui pèse sur le travail des éducatrices, ce sont les écrans, et les réseaux sociaux : "Certains enfants ne décrochent pas et ne vont plus à l’école dès l’âge de onze ans. On voit aussi de plus en plus de troubles oculaires, d’épisodes d’épilepsie, et une violence qui se manifeste par des passages à l’acte de plus en plus précoces." La solution ? Motiver les parents pour qu’ils proposent d’autres activités : "Mettre ses enfants dans un club de sport leur permet de s’éclater, d’améliorer leur auto-estime, et de libérer du temps pour les parents qui peuvent faire autre chose". Heureusement, il y a parfois de belles histoires, qui finissent bien. Dans le milieu des éducatrices, on appelle ça les SAV, pour service après-vente. "Deux petits garçons, que j’ai eus entre leurs 4 et 6 ans, m’ont retrouvée et m’ont rappelée pour me dire qu’ils avaient réussi leur vie… Ils avaient 26 ans", raconte l’une d’entre elles. "Des jeunes qui bénéficient d’une mesure de suivi éducatif nous supplient parfois pour qu’on les laisse encore un an", ajoute une autre. Toutes sont d’accord : "Il n’y a pas de fatalité".

 

Des structures d'accueil débordées

« À Olonzac il n’y a plus d’assistante sociale », « un rendez-vous de santé mentale au centre médico-psychologique de Béziers, c’est deux ans d’attente »… Les éducatrices du SOAE déplorent un délitement des structures qui pourraient aider les enfants et leur famille. Elles ne sont pas les seules. Dans un communiqué publié le 3 mai, la section CGT du Foyer départemental enfance et famille (FDEF) assure ne « plus pouvoir garantir la prise en compte des besoins fondamentaux de l’enfant ». Le FDEF gère plusieurs structures d’accueil d’urgence, dont une à Béziers, qui sont débordées, avec 178 enfants pour 123 places. Les situations les plus critiques sont celles des accueils petite enfance (63 jeunes pour 36 places) et adolescents (62 jeunes pour 44 places). A Béziers, une structure en centre-ville – les adresses sont tenues secrètes - conçue pour recevoir 5 enfants… en héberge 11.

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Les commentaires (4)
Ha oui Il y a 12 jours Le 07/05/2024 à 06:48

Le maire n'était pas au courant , il va s'en occuper !

Anonyme161943 Il y a 12 jours Le 06/05/2024 à 17:25

en parlant de ...."restaurant" du coeur, dans toute la région les restaurants risquent de fermer par manque de personnel. Quand aux femmes mono parentales, si elle ne désireraient pas un enfant comme on désire un animal domestique sans s'assurer du devenir de celui-ci ni du sérieux du conjoint

Anonyme176968 Il y a 11 jours Le 07/05/2024 à 23:36

Si elles ne désiraient pas...

LA MORALE Il y a 12 jours Le 06/05/2024 à 17:21

qu ils leurs donnent des preservatifs