"Je suis resté un villageois" : Jean-Baptiste Durand rêve éveillé de Montpeyroux à Cannes en passant par Le Pouget

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  • Jean-Baptiste Durand assume d’être résté "un villageois" comme il le raconte dans ses films.
    Jean-Baptiste Durand assume d’être résté "un villageois" comme il le raconte dans ses films. Midi Libre - GIACOMO ITALIANO
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Alors qu’il n’y était pas destiné, l’Héraultais de Montpeyroux est devenu un réalisateur césarisé avec "Chien de la casse" qui raconte les tribulations d’amis de village oisifs et perturbés par l’arrivée d’une jeune fille. Retour sur un parcours aussi atypique qu’extraordinaire d’un génie qui s’ignorait et qui va monter les marches de Cannes.

"Je n’ai jamais vraiment rêvé ce qui m’arrive car je ne savais même pas que l’on pouvait faire ce métier de réalisateur". Pourtant, Jean-Baptiste Durand est arrivé au sommet de cet art, un peu malgré lui, grâce à un talent de réalisation hors normes, plein de sensibilité, signé dans son premier long métrage Chien de la casse, tourné dans l’Hérault au Pouget, auréolé au mois de mars de deux César. Dont un pour lui, pour un premier film et un autre pour le héros de son œuvre, le phénomène Raphaël Quenard.

Pour un coup d’essai, reconnaissons que c’est un coup de maître ! Mais la modestie quasi maladive de Jean-Baptiste Durand pourrait en souffrir. Alors n’insistons pas. Rembobinons le film. Il naît en 1985 à Antibes, passe par un village du Loir-et-Cher avant de partir "reconnecter aux racines du midi" à Montpeyroux avec son frère Xavier, pour les besoins professionnels d’un papa qui bossait dans les économies d’énergie et d’une mère psychologue.

Une vie "au présent"

Les Durand poseront leurs valises dans ce charmant village viticole de la vallée de l’Hérault où on cultive un très bon raisin et, pour cette jeunesse active, un peu l’ennui. Ce que réfute le réalisateur : "J’avais 12 ans et, c’est là où ma vie a commencé. Mais je ne me souviens pas m’être ennuyé. Il y avait du vide peut-être, mais nos imaginaires tournaient à bloc et on se tapait des barres de rires", dit Jean-Baptiste avec le souvenir d’années heureuses insouciantes et faites "de haut et de bas comme pour tous les adolescents de notre âge".

Le petit Durand profite de cette vie de village "au présent. Je ne me projette pas. Ce qui a toujours fait un peu flipper ma mère". C’est quelqu’un de l’intérieur, un cérébral qui aime le foot, le rap et les potes. "On jouait comme des dingues" et le samedi soir il filait en bande au stade, celui de la Mosson, où il se rendait par n’importe quel moyen.

Fan absolu du MHSC

Aujourd’hui encore, ce fan de foot est malheureux quand il ne peut pas voir son équipe de cœur : le MHSC. Un hommage qui ravit le président du club Laurent Nicollin qui a joué le jeu avec le réalisateur : "Il nous avait demandé des produits dérivés pour son film sans imaginer qu’il aurait des César. C’est dingue mais ça fait plaisir de voir que c’est un vrai passionné et qu’il n’y a pas que des supporters de Marseille ou de Paris".

L’hommage ultime a été de l’inviter à donner le coup d’envoi du match contre Strasbourg à la Mosson : "Une consécration", sourit Jean-Baptiste Durand, pur pailladin absolument incollable sur son équipe orange et bleue.

"Allergique à l’école"

Retour au collège qu’il passe à Gignac où il se fait de nouveaux amis et où il cultive son amour d’être "un villageois que je suis et que je suis resté". Il passe un bac littéraire sans conviction avec 67 points à rattraper "un miracle" puis, parce que c’est l’usage, fait des études. "J’étais allergique total à l’école, à part le dessin, je ne savais rien faire, si j’aimais lire. J’étais un créatif, mais je ne savais pas trop quoi faire".

Parce qu’il veut rester à Montpellier, il décide d’entrer aux Beaux-Arts où ce dessinateur va découvrir la vidéo qui va ostensiblement changer sa vie : "J’ai rencontré mon destin aux Beaux-Arts, à la découverte de l’image, des histoires que l’on peut raconter. Je ne savais même pas que l’on pouvait en faire un métier".

Une vie au RSA

Le lymphatique adolescent va, dès lors, devenir "un travailleur acharné". Désormais installé à Montpellier dans le quartier Boutonnet, il va raconter ce qu’il connaît le mieux : la vie de jeunes en zone rurale ce qui sera la trame de Chien de la casse : "Il a fait un film qui lui ressemble avec une grande force et une délicatesse de son univers très personnel de cette zone périphérique avec une approche humaine, attentionnée car c’est quelqu’un d’extrêmement sensible", souligne Marin Rosenstiehl d’Occitanie Films qui a pu accompagner le réalisateur.

Car c’est depuis Montpeyroux mais finalement tourné au Pouget que le film césarisé va devenir une œuvre unique. "C’était une claque quand on a projeté le film dans la salle communale avant l’avant-première, se souvient le maire du Pouget Thibault Barral. Il raconte une jeunesse qui est celle qu’on a vécue, comme beaucoup. Il y a une grande sincérité, ce côté un peu dur dans l’oisiveté, dans les rêves qui se réalisent ou les désillusions".

"Une deuxième école" pour apprendre son métier

Aux Beaux-Arts, l’homme qui ne se savait pas encore réalisateur, "dont la culture cinématographique s’arrêtait aux films de De Funès" va faire des rencontres déterminantes, comme Dorris Haron Kasco cinéaste ivoirien ou son idole, le dessinateur Abdelkader Benchamma. À sa sortie, il fera "une deuxième école" pour apprendre le métier, vit du RSA et de prix glanés ici et là : "Heureusement j’ai un goût prononcé pour les pâtes", vivant "en coloc dans un appartement éclaté".

Mais il sait désormais ce qu’il veut faire, apprend sur les tournages comme technicien et fait une rencontre déterminante aussi "majeure qu’improbable", avec celle qui deviendra sa productrice Anaïs Bertrand. C’est elle qui le repère et le contacte via Facebook après avoir adoré ses dessins sur "Google images. Il est monté à Paris me rencontrer et quand il a ouvert la porte pour la première fois, j’ai eu de suite le coup de cœur. J’ai aimé sa tête. J’ai su de suite que c’était le début d’une longue aventure"», assure la productrice qui va l’accompagner pour son premier court métrage Il venait de Roumaine.

Une aventure de dingue

Elle lui permet de peaufiner son art, d’apprendre à écrire un scenario, obtient les financements pour tourner. Le court sera récompensé. Il lui faut un long métrage, il ressort un texte de 90 pages écrit en 2010 qui s’intitule déjà Chien de la casse. La trame est là mais il y a tout à faire. À refaire. Anaïs Bertrand le suit à l’instinct, l’inscrit à des résidences d’écriture. Il obtient des aides de la Région Occitanie, du CNC… puis un budget de 1,2 M€, pour faire son film.

La suite on la connaît : une aventure dingue de 25 jours de tournages au Pouget… puis le succès. Qui lui donne la liberté d’écrire son deuxième long métrage. Il a déjà un titre : L’homme qui avait peur des femmes. Et, malgré l’impatience, le méticuleux professionnel va prendre son temps pour peaufiner son deuxième opus qui sera très attendu.

Avant cela, Jean-Baptiste Durand qui est aussi acteur, va monter les marches du festival de Cannes, ce qu’il n’avait pas pu faire pour Chien de la casse. Ce sera pour son rôle dans Miséricorde d’Alain Guiraudie, ce lundi. Voilà où ca mène de n’avoir pas eu le rêve d’être réalisateur.

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